Le philosophe (matérialiste et de gauche) André Comte-Sponville est interrogé par La Voix du Nord à l’occasion de la publication de son nouvel ouvrage.
La liberté d’expression serait-elle en train de rétrécir ?
« En tout cas elle existe ! Les polémiques le confirment. Mais ce qui la menace, c’est ce qu’on appelle le politiquement correct, qui est en fait un moralement correct. Il y a une pression moralisatrice qui rend les choses difficiles à dire. C'est l'exemple de Zemmour : on condamne ses propos parce qu’on le soupçonne de racisme mais on ne se pose pas la question de savoir si ce qu’il avance est vrai ou faux. On ne peut pas parler. Tout de suite il y a procès moral. D’ailleurs, on n’évoque pas les “propos” de Zemmour mais le “dérapage” de Zemmour. »
On parle d’autocensure, de couvre-feu moral… nous serions dans une nouvelle ère du politiquement correct ?
« Oui, et je vais prendre un autre exemple. Christian Vanneste a été condamné deux fois parce qu’il a affirmé que “l’homosexualité était inférieure à l’hétérosexualité”. Je ne suis pas d’accord avec lui mais il a le droit de le dire. D’ailleurs, la Cour de cassation a annulé cette condamnation. Christian Vanneste est catholique et c’est la position de l’Église catholique de dire que l’homosexualité [vécue, c'est-à-dire le comportement homosexuel, NDLR] est un péché. N’a-t-on plus le droit, en France, d’être catholique ? Tous les êtres humains sont égaux en droit et en dignité mais tous les comportements et toutes les idées ne se valent pas. Qu’un chrétien juge que le christianisme est supérieur à l’Islam, c’est la moindre des choses. Ce n’est pas du racisme tant qu’il reconnaîtra que les musulmans ont une dignité et des droits égaux aux siens. On a le droit “d’être contre”. » (…)
Cela valait le coup d'être rappelé par un homme de gauche.
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