Le philosophe catholique Fabrice Hadjadj décrypte dans Le Figaro ce que certains médias appellent "la crise de l'Eglise catholique" :
"cette crise n'est pas sans précédent. Il y en eut d'autres, probablement pires : la crise arienne du IVe siècle, le Grand Schisme d'Occident au XIVe, les mœurs scandaleuses de certains papes comme Alexandre VI Borgia, assassin, concubinaire et simoniaque, pour ne prendre que quelques exemples saillants. Si bien que nous sommes obligés de reconnaître que l'Église n'a cessé de traverser des crises. C'est dans sa nature, en quelque sorte. Qu'on regarde ce fait sans préjugé, et le phénomène apparaît presque incroyable : alors que toutes les autres institutions ont été balayées par les tempêtes de l'histoire, voici que, depuis plus de deux mille ans, la « barque de Pierre » poursuit sa route, avec une succession apostolique ininterrompue et un enseignement qui pour l'essentiel s'est développé sans se contredire.
"L'Eglise n'a cessé de traverser des crises. C'est dans sa nature."
Cette longévité exceptionnelle suppose forcément une aptitude exceptionnelle à prendre des coups.
L'Église (...) ne vit pas à partir de son image dans les médias. Si telle était le cas, elle ne chercherait plus à parler au fond des cœurs, mais à caresser dans le sens du poil. Il n'en demeure pas moins que les crimes commis par un prêtre sont infiniment plus graves que s'ils sont commis par un professeur d'EPS, par exemple. Et c'est cela qui peut légitimer l'emballement médiatique que nous avons connu. Le paradoxe est le suivant : si l'on attaque spécialement les gens d'Église lorsqu'ils se pervertissent, c'est qu'on a l'instinct de la pureté spéciale de leur mission.
De ce point de vue, l'image de l'Église est d'autant plus affectée que l'on croit à la sainteté de l'Église, parce que c'est alors que le scandale devient d'une gravité sans comparaison. Ainsi Benoît XVI, qui sait ce qu'est le mystère du prêtre, trouve ces crimes bien plus terribles que les médias non chrétiens ne peuvent le concevoir. Voilà pourquoi il a voulu faire toute la lumière là-dessus.
"Nous n'en aurons jamais fini avec les crises"
(...) nous n'en aurons jamais fini avec les crises. Et, d'une certaine manière, cela n'est pas si mal. Vous savez que le mot «crise» vient du verbe grec krinein, qui signifie passer au crible ou discerner. La situation de crise nous empêche de dormir sur nos lauriers. Elle nous pousse à nous poser la question du sens, à creuser en nous-mêmes et à chercher un bien plus vaste et plus profond."
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