par Christian Vanneste, député du Nord
Gribouille serait-il de retour ? Est-il pertinent pour diminuer la pollution de créer une usine à gaz fiscale supplémentaire ?
La taxe carbone génère en tout cas un brouillard dans le ciel des idées claires de la majorité.
Première idée : la France est lourdement handicapée par le poids de ses prélèvements obligatoires qui favorisent les produits en provenance des pays avantagés par le dumping social et écologique. Toute nouvelle taxe pesant sur nos coûts de production est donc à proscrire.
Deuxième idée : le pouvoir d’achat et la consommation doivent résulter de la création de travail et de la production de richesses. Les transferts sociaux sont déjà très importants dans notre pays. Toute proposition de redistribution du produit d’une taxe frappant nos entreprises, en vue d’accroître la consommation est suicidaire puisqu’elle favorise doublement les produits en provenance de pays démunis de protection sociale et de fiscalité écologique. Le discours démagogique stigmatisant telle ou telle grande entreprise française est de ce point de vue indigne d’un responsable politique de haut niveau.
Troisième idée : l’importance de l’électricité d’origine nucléaire dans la production d’énergie de notre pays est un atout considérable. Elle contribue fortement à la réduction de nos rejets de gaz carbonique. Il serait absurde de la pénaliser.
Quatrième idée : chacun sait que la carotte est en général plus efficace que le bâton. La prime à la casse le prouve une fois encore en permettant un rebond de l’industrie automobile française, qui construit d’excellentes petites voitures peu gourmandes.
Cinquième idée : la croissance nécessaire à l’emploi peut et doit s’appuyer sur le développement durable. Cette conception n’est pas celle des écologistes qui visent en fait aujourd’hui la décroissance et ne craignent pas une fiscalité qui la favoriserait.
Chargé d’occuper le terrain écologique, Jean-Louis Borloo est un ministre actif et sympathique, élu du Nord. Mais il est radical. Sa position au centre-gauche explique une tendance mal contrôlée à augmenter les dépenses et les recettes de l’Etat. Nous n’avons échappé que de peu à la taxe « pique-nique ». Il a malheureusement également contribué au renoncement à la TVA sociale qui équilibrait la baisse des charges de nos entreprises, et l’augmentation du coût des produits importés. La majorité doit mettre un terme aux discours qui privilégient la démagogie et la mode, la redistribution et l’environnement, au détriment de notre économie, de la création de travail et de richesses sur notre territoire.
Le bon sens devrait nous conduire à trois conclusions.
D’abord, il ne faut pas plus d’impôt et plus de redistribution, mais moins d’impôts, plus de travail et donc plus de véritable pouvoir d’achat.
En second lieu, la France n’est pas une île. La seule mesure équitable sur le plan de la fiscalité écologique consisterait à taxer les produits selon leur provenance en proportion de la part que prennent les énergies génératrices de CO2 dans la production nationale. Cela ne frapperait ou n’encouragerait que des politiques nationales, et non des personnes, des ménages, ou des entreprises qui n’ont pas la pleine maîtrise de leur dépense énergétique (transport, chauffage par exemple). On dira bien sûr que l’OMC s’opposera à ce type d’orientation, sans parler de l’Europe… Mais n’est-ce pas le Président de la République qui a proposé la création d’une Organisation Mondiale de l’Environnement ? N’est-ce pas l’Europe qui exige qu’en 2020 notre énergie soit renouvelable à hauteur de 20 % et que nous diminuions de 20 % sa dépense globale ? Des avancées ont été réalisées ces derniers temps : ainsi, l’OMC a publié, fin juin, un rapport conjoint avec le PNUE (Programme des Nations Unies pour l’environnement) où elle se montre ouverte -certes d’une manière évasive- à la mise en place d’une telle taxe et des pays, comme les États-Unis en juin, ont pris des mesures unilatérales. Certains pays comme la Suède ou la Finlande ont certes introduit une taxe sur le CO2 mais en l’accompagnant d’une baisse des charges sur le travail afin de maintenir ou même d’améliorer la compétitivité des entreprises. C’est un exemple dont on peut s’inspirer.
Enfin, si le but de la taxe carbone n’est pas de renflouer Bercy mais de lutter contre le réchauffement climatique et le rejet de gaz carbonique, il est infiniment plus urgent de multiplier les incitations et les encouragements à participer à cet effort plutôt que de pénaliser inutilement nos entreprises et nos ménages. Primes et avantages fiscaux liés aux investissements réduisant la consommation d’énergie, TVA réduite pour les produits respectueux de l’environnement, soutiens aux entreprises qui concourent à la réduction des rejets de CO2 ou à sa récupération, depuis l’installation du chauffage solaire, jusqu’à l’aménagement forestier : telles sont les mesures indispensables.
Un discours positif qui stimule l’effort et encourage la participation à une œuvre collective dont chacun peut espérer les dividendes personnels, me parait beaucoup plus performant que la mise en œuvre d’un système compliqué de taxation et de redistribution. Certes, celui-ci illustre une fois encore le génie de l’exception française. Sachons pourtant renoncer à cette manie de la complexité qui nous conduit à construire sans cesse de nouvelles usines à gaz fiscales et administratives. La première mesure écologique, c’est de dépolluer l’atmosphère de notre fiscalité et de notre économie. Choisissons l’écologie fiscale plutôt que la fiscalité écologique.
- Le site de Christian Vanneste
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