De Neill Blonkamp, avec Sharlto Copley, David James, Jason Cope, Nathalie Bolt, John Sumner
Synopsis: Voici 20 ans, un vaisseau extraterrestre s'arrêta au-dessus de Johannesburg, faisant débarquer sa population d'extraterrestre étrange et nombreuse dans la ville. Très vite, la cohabitation fut impossible avec les humains et les nouveaux arrivants sont parqués dans un ghetto appelé le district 9, gèré par l'ogranisation internationale MNU et où règent très vite la misère, la criminalité et les trafics en tout genre. De nos jours, les autorités décident finalement d'évacuer la population extraterrestre de cet endroit pour les transfèrer vers un camp d'accueil plus vivable. Mais l'opération se passe mal: il y a des morts des deux côtés et, surtout, le responsable légal de l'équipe est, Wikus van de Merwe, est contaminé par un étrange produit des aliens qui provoquent en lui une mutation tendant à le faire ressembler à ces derniers. Réussissant à échapper au MNU et devant s'associer avec l'un des extraterrestres, s'engage dans une course contre la montre pour éviter de perdre définitivement son identité.
Critique: Voici sans aucun doute l'un des films de science-fiction les plus marquants et les plus originaux de son époque (Il est vrai que dans cette catégorie, ce n'était sûrement pas "Terminator: Salvation" qui allait lui faire concurrence!). Arrivé tout doucement sans publicité tapageuse, il s'agit d'une oeuvre du sud-africain Neill Blonkamp qui avait déjà réalisé une précédente version en court-métrage "Alive in Joburg", ainsi qu'un autre court co-réalisé par le désormais immense Peter Jackson ("Fantôme contre fantôme", la trilogie "Le seigneur des anneaux", le remake "King Kong"), lequel officie d'ailleurs comme producteur du film (qui est donc d'origine américaine et néo-zélandaise). Le casting quant à lui est composé entièrement de quasi-inconnus, y compris pour le personnage principal qui devrait cependant être appelé à être rapidement célèbre (j'y reviendrai). Une équipe neuve donc pour un film qui ne l'est pas moins et qui se montre novateur à bien des égards.
Il y a d'abord la forme. Le film commence comme une sorte de reportage télévisé durant son générique et ses dix premières minutes, pour prendre ensuite une narration plus classiques, mais toujours mis en scène de manière très réaliste (le plus souvent caméra à l'épaule) et palpitante. Bien qu'étant doté d'un budget très confortable, le film n'est de toute évidence pas un blockbuster comparable aux réalisations de Steven Spielberg ou Michael Bay. On n'assiste pas ici à une débauche incessante d'effets spéciaux et pyrotechniques, le scénario se concentrant essentiellement sur les personnages très étoffés ainsi que sur le contexte socio-politique où ils évoluent. Les effets spéciaux sont cependant bien présents, surtout durant la dernière demi-heure, et sont évidemment de très bonne qualité, s'intégrant harmonieusement au film sans l'alourdir. Les acteurs sont tous excellents, leur très faible notoriété leur conférant une grande crédibilité et un naturel bluffant. Mention spéciale à Sharlto Copley, interprète de Wikus Van de Merwe, qui passe très aisément du registre du petit fonctionnaire trouillard et mesquin à celui de héros déchu et traqué qui fera preuve d'un courage et d'une ingéniosité insoupçonnés pour survivre.
Mais ce qui fait surtout la particularité et l'attrait de "District 9" est son propos satirique assez osé. Sans doute dépassé par cet ovnis (dans tous les sens du terme!) trop bien fait et au succés trop grand pour qu'on puisse le descendre (à moins qu'ils n'y aient strictement rien compris!), les critiques bobo-gauchos en ont fait une dénonciation science-fictionnelle de la politique d'apartheid de l'Afrique du Sud (près de vingt ans après son abolition, bravo les gars!). En fait, il n'en est rien. La référence aux communautés raciales séparées par voie législative durant cette période est bien présente durant le générique (ainsi que dans le titre qui fait référence au district 6 qui a réellement existé), mais n'est aucunement le moteur de l'histoire. La société que montre crûment le film est bien plutôt celle d'aujourd'hui, une Afrique du Sud post-raciale gangrénée par le chômage, la criminalité des gangs, la corruption, l'impuissance gouvernementale. A cet égard, une partie de l'Afrique actuelle en prend pour son grade, notamment au travers de l'image du gang de trafiquants nigérians présentés comme des criminels sans scrupules doublés de véritables sauvages adeptes de rituels magiques sanglants et de sacrifices extraterrestres. Mais ce sont surtout les organisations internationales type ONU qui sont particulièrement dévalorisées via le portait du MNU qui, sous couvert d'assurer la paix mondiale, se révèle être une bureaucratie immorale et criminelle, prête à tout pour pouvoir se servir des armes extraterrestres très puissantes, y compris charcuter le malheureux héro qui était l'un des leurs quelques heures auparavant! Voici une dénonciation sans concessions de la prise du pouvoir par les instances et multinationales mondialistes et leur asservissement des gouvernements nationaux. Une vision très pessimiste de l'humanité donc, et aussi très politiquement incorrecte, ce qui change agréablement par rapport au ton des productions habituelles du genre. Neill Blonkamp, qui vit et travaille désormais aux Etats-Unis, a d'ailleurs déclaré dans une interview que, pour savoir ce que deviendrait la France dans un futur proche, il suffisait de voir ce qui se passe actuellement en Afrique du Sud post-apartheid. Nul doute que ce monsieur n'auriat jamais put faire carrière en France!
Un film mémorable dans tous ses aspects et à visionner d'urgence par tous les amateurs de science-fiction mais aussi de bon cinéma de genre. Et comme une bonne nouvelle n'arrive jamais seule, il est désormais clairement établi que "Rose et noir" de Gérard Jugnot est un échec sans appel, totalisant moins de 100000 entrées après un mois d'exploitation. L'espoir existe pour le 7e art!
Raspail
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