par Philippe Randa
À part le score du Front national, toujours bien vivant contrairement aux espérances de certains et aux cauchemars de quelques autres, le résultat des élections régionales est en tout point conforme à ce qui avait été annoncé : claque à l’UMP, gros score du PS, ancrage d’Europe Écologie et du Front de gauche dans le paysage politique, effondrement du Modem… tandis que les petites listes purement régionales n’ont fait que de la figuration plus ou moins réussie. Autre résultat attendu, celui de l’abstention : 53,6 %. Un taux record en France qui “détrône” celui de 1998 (42,3 %). Plus ça va mal, moins ça vote.
Alors, resurgit de façon désormais récurrente, l’idée – voire le spectre – de rendre le vote des Français obligatoire.
La mort électorale dans l’âme, faudra-t-il ou non s’y décider, puisque la moitié du corps électoral se moque ainsi de cette inestimable liberté dont tant d’autres peuples voudraient bien profiter. Ne serait-ce qu’en rêve pour quelques-uns.
Oui, mais voilà : si les enfants de la démocratie sont de plus en plus des électeurs sauvages, il ne faudrait pas prendre leurs responsables politiques pour les premiers kamikazes venus.
Contraint et forcé par une loi – une de plus ! – à “profiter de sa liberté électorale le jour où on lui dit d’en profiter” au risque d’une amende – une de plus ! – imaginez que cet électeur récalcitrant soit également automobliste et/ou fumeur, sa vie deviendrait – mais n’est-ce pas déjà le cas ? – un long fleuve de contraventions.
Et puis, si on obligeait 1 électeur sur 3, voir 1 sur 2 comme dimanche dernier, à amputer deux sacro-saints week-end par an d’un déplacement ludique, familial ou sportif, voire à simplement le contraindre à perdre une heure pour se rendre à son bureau de vote faire la queue et le forcer ainsi à donner sa voix à un candidat en liste, le risque d’un boomerang électoral serait trop grand pour l’establishment politique.
Quelle bonne (surtout mauvaise) raison pourrait inciter cet électeur récalcitrant à glisser un bulletin de vote droite-saumon ou gauche-caviar dans l’urne ? Ce vote obligatoire lui offrirait l’occasion de se défouler en votant pour une liste dite “extrême”, de droite ou de gauche… si tant est qu’il n’hésite pas à faire élire un “comique” qui aurait le mauvais goût, tel un Coluche d’antan ou un Dieudonné d’aujourd’hui, de solliciter les suffrages de ses compatriotes…(1) Car ces Français qui boudent les urnes sont sans doute bien davantage réprésentatifs de ce fameux “électorat contestataire” – ô combien ! – que celui qui glisse dans l’urne un bulletin de vote aux couleurs Front national, Europe Écologie, Front de gauche ou NPA…
L’absentation, même massive, n’est finalement qu’un “moindre mal” pour le système, malgré les larmes de crocodiles déversées désormais chaque soir d’élection par ceux qu’elle arrange finalement plutôt bien.
(1) Rappelons que la candidature de Coluche lors de l'élection présidentielle française de 1981 était crédité par les sondages de plus de 16 % d'intentions de vote… et que se présentait à ces mêmes élections Michel Debré, Premier ministre et père de la consitution, qui n’obtint finalement que 1,66 % des suffrages.
Philippe Randa est rédacteur en chef adjoint de Flash Magazine (site).
Scrutin Sarkozy Midterm: plus Flop, je meurs ? ( Petit Sondage: http://www.pnyx.com/fr_fr/poll/575 )
Rédigé par : Orange | 16 mars 2010 à 13h22