Benoît XVI a raison : le préservatif n'est pas l'idéal dans la
lutte contre le Sida, parce que la prévention de la contagion concerne
tous les aspects d'une personne et demande donc une réponse culturelle.
C'est ce qu'a affirmé Edward Green, anthropologue et directeur de l'Aids Prevention Research Project de la Harvard School of Pubblic Health and Center for Population and Developement Studies, qui est intervenu le 25 août au Meeting de Rimini sur le thème « Le Sida, un problème culturel ».
Avec
une expérience de plus de trente ans dans les pays en voie de
développement, Edward Green avait déjà présenté une étude, en janvier
2004, au Medical Institute for Sexual Health à Washington D.C.
qui démontrait les résultats insuffisants produits par la distribution
de préservatifs sur le continent africain, en particulier en Afrique
sub-saharienne.
Dans son intervention, E. Green a mis l'accent
sur les déclarations prononcées par le pape sur l'inefficacité du
préservatif dans la lutte contre le Sida et sur la nécessité d'un
« réveil spirituel et humain », durant le vol pour le Cameroun, à
l'occasion de son premier voyage apostolique en Afrique, en mars 2008.
Ces déclarations avaient suscité indignations et critiques.
« La
proximité des commentaires du pape avec les découvertes scientifiques
les plus récentes m'a touché », a commenté l'anthropologue.
En
effet, a-t-il expliqué, « il n'y a aucune preuve que les préservatifs
aient une quelconque efficacité dans la réduction à grande échelle du
Hiv, en particulier en cas d'épidémies très étendues, comme en
Afrique ».
« C'est un instrument qui peut peut-être fonctionner
pour de simples individus mais pas nécessairement pour des populations
et des pays », a-t-il précisé.
« Et pourquoi cela ne
fonctionne-t-il pas en Afrique ? Avant tout parce qu'il n'est pas
utilisé régulièrement, parce qu'il y a une faible demande, parce que
cela réduit le plaisir, parce que cela indique un manque de confiance
au sein du couple et surtout parce qu'il y a ce que l'on appelle la
‘compensation du risque' », a-t-il expliqué.
Ce dernier est le
phénomène engendré par la fausse perception de protection liée au
préservatif qui pousse les personnes à s'exposer à de plus grands
risques et donc à augmenter les possibilités de contracter le virus.
« Tous
ces principes sont immuables et généraux - a affirmé E. Green - et il
ne suffit donc pas de dire ‘il faut que tout le monde utilise toujours
le préservatif' parce que cela ne se passe pas comme cela ».
En
particulier, « les stratégies centrées sur les préservatifs ont
initialement été développées aux Etats-Unis, en pensant aux groupes les
plus vulnérables, à ceux les plus exposés aux infections, c'est-à-dire
aux homosexuels masculins, aux héroïnomanes et aux prostituées ».
A
ce moment-là, « les ressources pour la prévention étaient
principalement utilisées pour la réduction du risque ou pour développer
des solutions médicales ».
Initialement, pour prévenir le Hiv
on utilisait en premier lieu le préservatif, des tests diagnostiqués
sur une base volontaire, le traitement d'autres maladies vénériennes
qui peuvent faciliter la transmission du Sida dans le virus,
microbiocides vaginaux et des médicaments antirétroviraux.
« En
réalité, il n'y avait aucune preuve que ces mesures préventives
réduisent la diffusion du Hiv en Afrique, parce qu'elles n'ont pas eu
d'impact général sur l'épidémie », a-t-il affirmé en précisant que ces
interventions se sont au contraire révélées fructueuses dans des pays
comme la Thaïlande et le Cambodge, où le Hiv est surtout transmis par
les prostituées.
En réalité, sur la base des résultats de
certaines recherches, « la fidélité et la circoncision masculine
semblent avoir eu de bons effets en Afrique, aboutissant à une
réduction de 60 % dans la réduction du Hiv ».
Aux Etats-Unis, entre 1982 et 1985, quand on ne parlait plus du Sida comme de la slim disease,
« les homosexuels et les héroïnomanes étaient considérés comme des
groupes très stigmatisés et marginalisés » et « personne ne pouvait
lancer de jugement moral sur leurs habitudes sexuelles parce qu'il
s'agissait de la sphère privée et cela était donc intouchable ».
La
liberté sexuelle, a souligné Green, était considérée par la communauté
« gay » comme une conquête, fruit d'une longue bataille à laquelle on
ne pouvait pas renoncer.
Quand ensuite les Etats-Unis ont
commencé à lancer des programmes au niveau international, exportant le
modèle centré sur le préservatif aux autres pays, indépendamment du
mode de diffusion de l'épidémie, les personnes qui se sont montrées les
plus intéressées ont été les activistes gays et les experts en
planification familiale.
Le préservatif étant aussi une
technologie à bas coût, a continué Green, « la prévention du Sida est
devenue une sorte de business ».
En Ouganda, au contraire, qui
est fortement touché depuis 1986 par cette maladie, qui cause chaque
année plus de 900.000 morts, « le Sida a été considéré comme un
problème comportemental et pas seulement médical », a raconté Edward
Green.
« On a cherché à éviter et non pas à réduire le
risque », en utilisant aussi la campagne des affiches destinées à faire
peur aux gens, mais sans stigmatiser les séropositifs, afin de
renverser le paradigme alors dominant.
On a donc pointé sur l'approche « ABC » du Sida (Abstain, Be faithful, use Condoms,
c'est-à-dire Abstinence, Fidélité, Préservatif) avec une campagne
lancée en 1987 et destinée à sensibiliser les personnes sur
l'importance de rester vierge jusqu'au mariage, d'éviter les relations
sexuelles occasionnelles et de n'avoir qu'un seul partenaire.
Cette
mobilisation dans un pays symbole - l'Afrique subsaharienne - a mené à
une réduction des séropositifs passés de 21% à la fin des années 1980 à
6,4% en l'an 2000, et une réduction du Hiv de 75% chez les personnes
ayant entre 15 et 19 ans, et de 60% chez les 20-24 ans.
Source : Zenit.
Thibaud
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