Fabrice Madouas a rencontré pour Valeurs Actuelles Eric Brunet, auteur d'un nouveau livre, Dans la tête d’un réac :
« Ce livre n’est pas dédié à Jean-Paul Sartre, à Ernesto Guevara, aux maoïstes de salon, aux collèges Louis-Aragon, aux lycées Maurice- Thorez, aux maternelles Elsa-Triolet, aux grands gisants du Panthéon, à Robespierre et sa clique, à Karl Marx, aux Inrockuptibles, à Télérama, à Yannick Noah, à BHL, à Philippe Sollers, aux josébovistes, à Jack Lang… Il y en a deux pages ainsi, où l’on trouve aussi cités Emmanuelle Béart, Fidel Castro, Guy Carlier, les IUFM et les bobos : « les bolcheviks-Bollinger, comme on dit à Londres », précise Éric Brunet.
On apprend notamment que
la droite – cette énumération le prouve – est d’abord un tempérament. « Être de droite, en littérature comme en politique, c’est avoir le goût du panache, résume Éric Brunet. Et ne pas craindre de revendiquer sa singularité, ce qui passe souvent par l’affirmation de valeurs somme toute très accessibles : l’homme de droite préfère le mérite à la répartition ; il est moins cartésien que pascalien ; il aspire à la transcendance. Et, contrairement à la gauche, il voyage léger : pas de fonds dogmatique pesant, pas de rituels sacrés, pas de jargon. L’homme de gauche met de la gravité partout, l’homme de droite met de la légèreté en tout. »
Il arrive pourtant que l’homme de droite soit fatigué d’avoir raison, parfois même contre ceux qui disent le représenter : « En se tonyblairisant, la droite a perdu son doux substrat conservateur, churchillien. Privée de ses réacs, elle est devenue une antichambre du libéralisme. » Il se prend alors à rêver, comme Éric Brunet, « que demeurent encore quelques petits fragments de ce que nous aimions. Juste quelques lam - beaux, quelques fragrances éthérées, pour ma femme, mes enfants et ceux que j’aime. […]Que les modernes nous laissent deux ou trois écoles sans violence avec des profs un peu cultivés, quelques rues où il fait bon musarder le soir, avec des bistros joyeux. Pour l’été, le long des golfes clairs, quelques plages où ma femme pourra bronzer ».
Mais ce spleen se dissipe rapidement car l’homme de droite est, par complexion, propre à s’indigner : « La réaction est une forme accomplie de résistance, un eczéma sublime qui entretient ma révolte », écrit Éric Brunet. Et – divine récompense de sa ténacité – la droite a reçu récemment des renforts inattendus, ce qui laisse entrevoir un renversement et fournit à l’auteur sa conclusion : « Depuis quelques années, des réacs de gauche ont émergé du Pif (paysage intellectuel français), soutiens inespérés d’une cause que l’on pensait perdue. Ils sont arrivés fourbus en terre de réaction, car les traits empoisonnés que leurs anciens camarades leur avaient adressés étaient plus acérés encore que ceux que nous reçûmes.[…] Aujourd’hui, les réprouvés des deux camps ne sont plus vraiment de droite ou de gauche : ils mènent une mission d’intérêt général, de service public. Lorsque les progressistes sont ivres de pouvoir, prendre le maquis réactionnaire est un devoir », accompli toujours avec légèreté.
Thibaud
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